Illustration parfaite de démocratie sanitaire, le dispositif de patient-expert est-il connu de tous les malades vivant avec une sclérose en plaques ? Pas si sûr ! Sep mes Droits vous informe sur ce précieux rôle donné à des patients d’accompagner d’autres patients quand le diagnostic tombe.
La maladie rend-elle plus fort ? À cette question, chaque patient a sa propre réponse. Mais au-delà d’être fort, la maladie peut rendre actif, renforcer la responsabilité sociale grâce au statut de patient-expert, pour celles et ceux qui en éprouvent l’envie.
Qui, en effet, est le mieux placé pour parler du vécu d’une maladie chronique si ce n’est le patient lui-même ? Pour ressentir naturellement ce qu’un autre patient pourra éprouver au fil des premières années de suivi, au cours de consultations où la personne malade peut parfois se sentir envahie de termes barbares ? Pour confier au médecin ce qu’il est pertinent de dire à l’annonce de la maladie ? Le patient lui-même, bien sûr. C’est en partant de cette juste supposition que la France a vu naître ses premiers patients-experts, et rejoint des pays comme la Belgique, le Québec et la Suisse proactifs en la matière depuis plusieurs décennies¹.
En France, ce dispositif est sorti progressivement de terre, avec des premières racines dans l’engagement politique et militant des années SIDA. En 2002, le vote de la loi Kouchner relative aux droits des patients a mis sur la table le principe de consentement libre et éclairé, comprenant l’accès à une information claire et complète. Autres dates clés : le 21 juillet 2009 date de publication de la loi Hôpital, Patient, Santé et Territoire définissant le cadre de l’éducation thérapeutique du patient. Ce texte a ainsi été le premier à définir le rôle potentiel des patients-experts. L’année 2011 a ensuite été déclarée année des patients et de leurs droits. Principal objectif : « renforcer la visibilité et l’effectivité des droits des patients, améliorer leur information, et promouvoir leur place dans le système de santé »2-4.
Sur le papier, il était question d’instituer la présence de patients dans les structures de soins. Un point par ailleurs corroboré par la Haute autorité de Santé (HAS) dans une publication du 12 décembre 2023. Dans ce texte diffusé à l’occasion du vote de la Stratégie nationale de santé, la HAS « préconise que l’engagement et la participation des usagers soient réaffirmés dans toutes leurs dimensions ». La même HAS avait par ailleurs publié ses recommandations sur le sujet en juillet 2020, affirmant que « l’engagement des usagers dans le système de santé fait partie des nouveaux critères de certification des hôpitaux »1,5.
Depuis plus de 10 ans maintenant — et la France est pionnière dans ce domaine — il existe des formations diplômantes à l’Université de la Sorbonne (Paris) qui proposent des certificats ou diplômes universitaires* sur une année ainsi que des masterclass**. Des cursus également proposés dans les universités de Marseille et de Grenoble. Le principe : former les patients volontaires, en complément de tous les éléments qu’ils maîtrisent sur le bout des doigts et jusqu’au plus profond de leurs tripes de par leur vécu de la maladie. Au programme : un socle de connaissances plus solides sur l’éducation thérapeutique, sur les bases de la démocratie sanitaire. L’enjeu : donner une reconnaissance officielle aux compétences du patient expert. À noter que certaines associations proposent aussi leurs propres formations solides mais sans diplôme reconnu. C’est le cas de l’Association Française des Sclérosés en Plaques***6,8.
Bien sûr, les formations ne sont aucunement indispensables pour vous investir bénévolement dans des associations de patients ou vous engager auprès de CHU par exemple.
Les patients-experts sont ou ont été atteints d’une maladie chronique, dotés d’une capacité de réflexion, de mise à jour de ses connaissances scientifiques et de mise à distance de sa propre pathologie. Autres qualités naturellement requises : faire preuve d’empathie, d’implication, d’optimisme, d’appétence pour le travail en équipe7.
La plupart des patients-experts s’engagent en tant que bénévoles, même si la voix de la professionnalisation commence à s’ouvrir. Certains centres hospitaliers, les Hospices civils de Lyon par exemple, ont ouvert des postes de patients-coordinateurs pour reconnaître et intégrer cette compétence, en totale complémentarité avec l’équipe médicale. En effet, le patient expert ne se substitue en rien à la compétence du professionnel de santé et du personnel paramédical. Il vient comme relai, comme personne intermédiaire, pour soutenir, informer, aider des patients atteints de la même maladie que lui8.
L’oncologie reste l’ère thérapeutique dans laquelle le rôle de patient expert est le plus déployé à ce jour. Pour toutes les maladies chroniques et invalidantes, ces échanges avec une seule et même personne, se déroulent parfois sous la forme de groupe de parole1.
Le patient-expert crée du lien entre les patients et les soignants, et permet de libérer la parole des patients. Quelles sont alors ses différentes fonctions ?2,8
Progressivement, le terme de patient partenaire prend le pas sur celui de patient-expert pour mettre davantage en avant l’esprit collaboratif dans lequel cet engagement vers les autres patients se dirige1.
* Trois diplômes universitaires (DU) sont proposés : « mission patient·e partenaire et référent·e rétablissement en cancérologie », « intervenant·e en éducation thérapeutique » et « démocratie en santé »⁶.
** En complément des (DU), l’Université de la Sorbonne propose différentes masterclass dont le programme s’étale sur 40h : « le risque infectieux, l’accès aux soins et aux marchés, la formation de soignant·es par des patient·es formateurs et formatrices occasionnel·les, les parcours de soin complexes comme la drépanocytose, le syndrome du grêle court, le mélanome, la BPCO, le cancer du sein métastatique »⁶.
*** D’autres associations de patients comme la Fédération Française des Diabétiques ou l’Association France Rein proposent aussi des formations de patients experts.
M‑FR-00010622–1.0 — Établi en février 2024